Ewig muss die
liebste Liebe darben…
Was wir lieben,
ist ein Schatten nur.
Le plus
tendre amour doit être un éternel manque…
Ce que nous
aimons n’est qu’une ombre.
Hölderlin, du
poème intitulé À la Nature
Quelques jours ont
passé depuis mon arrivée à Y.
Il me faut
maintenant me résigner, même à contrecœur, à rentrer chez moi.
Dehors, les ténèbres
sont troublées par le fracas des vagues.
J’ai le cœur déchiré
et je me sens accablée par une puissante fatigue, après avoir passé une nuit
blanche. Si je reste plus longtemps éveillée, je crains de ne plus jamais
pouvoir dormir pour le restant de mes jours.
La fenêtre est
restée ouverte sur le ciel constellé. J’entends le faible sifflet d’un bateau à
vapeur…
Je finis par
céder au sommeil et programme l’alarme réveil de mon smartphone pour dix heures.
J’aurai tout juste le temps de plier bagage avant de rendre la clef de la chambre
à l’hôtelier.
À mon réveil, je
décide de me laver les cheveux et comme il fait un soleil resplendissant, je me
les sécherai en me penchant à la fenêtre.
Je vois alors,
au loin, tous les bateaux de pêche qui rentrent au port. Ma pensée vagabonde
anxieusement.
Je sens le froid
sur mes cheveux qui sèchent rapidement. Quelques mèches rebelles collent à mes
tempes, comme des touffes d’herbe froides.
J’ai peur de
toucher mes propres cheveux, cette chevelure froide qui sèche a la fraîcheur de
la mort. Je tressaillis.
Je décide de préparer,
rapidement, mes bagages, afin de rendre la clef de la chambre à l’heure prévue.
Je ne suis pas une personne qui supporte le retard.
Je ressens maintenant,
de façon quasi chronique, une douleur aigüe à mon épaule droite qui m’empêche
de faire beaucoup de gestes. Le vent marin de la nuit y est aujourd’hui
probablement pour quelque chose.
Je me force à
sourire constamment mais je me sens vieillir très vite.
Le miroir me
renvoie, chaque jour, une image grotesque et sans attrait. Il me faut à tout
prix conserver cette « forme » humaine en bonne santé au moins.
Ma vie, depuis
ma maladie et le grand confinement du début de l’année a pris un tour d’une
inquiétante irrégularité.
Je tombe souvent
dans des comportements empreints d’une légèreté artificielle et d’une euphorie
forcée, qui sont amplement excessifs, à mes yeux, et que les autres me
pardonnent et dont ils font presque la louange, oh profonde ironie, se
surprenant largement de mon état d’esprit joyeux et de ma profonde
métamorphose. Je semble vivre une seconde vie, dans la peau d’une doublure.
Or, ce semblant
rieur n’est qu’une imposture de plus.
Depuis toujours,
je ne crois pas au bonheur et je ne me réjouis de rien. Je le crains même secrètement.
Dès que j’entrevois quelque chose d’heureux et qui peut durer, je prends peur
et je m’enfuis aussi vite que je le peux.
Je pressens que
quelque chose de funeste est en attente et se prépare à frapper.
Cette pensée m’envahit
de mélancolie. Je ressens la même inquiétude qu’un prophète qui prédit audacieusement
l’avenir.
Une chose est sûre,
cependant, il reste en moi une force souterraine et insistante – la force de
vivre ! Pour combien de temps encore, qui le sait.
Il me faut maintenant
me résoudre à quitter cet endroit et faire le voyage vers le sud, vers ma ville
écrasée par la chaleur, où personne ne m’attend et où je passerais des journées
stériles et muettes, jusqu’à la fin de mes jours.
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