Alors que le
déconfinement s’effectue dans beaucoup de pays européens et du monde entier,
avec des mesures imposées pour limiter la transmission du coronavirus, comme le
port du masque obligatoire dans les espaces publics et les transports en
commun, la distanciation sociale dans les lieux de travail et les écoles et
restaurants, on assiste un peu partout à des mouvements de contestation contre
ces mesures jugées trop restrictives et visant supposément dénoncer les
limitations des libertés publiques.
Ces rassemblements
sont à vrai dire assez hétéroclites. En Allemagne, notamment, ils réunissent
des extrémistes, des opposants aux vaccins, des antisémites et des
complotistes. Ils dénoncent pêle mêle le port du masque dans les magasins ou
les restrictions de mouvement qui subsistent après le déconfinement autour d’un
slogan : « wir sind das volk » (« nous sommes le peuple »),
le cri de ralliement des Allemands de l’Est contre la dictature communiste, à l’automne
1989.
Ces manifestations
« constituent un réservoir dans lequel antisémites, conspirationnistes et
négationnistes peuvent se retrouver », met en garde Félix Klein, commissaire
du gouvernement pour la lutte contre l’antisémitisme, surtout quand ce
mouvement est soutenu notamment par le parti AfD (Alternative pour l’Allemagne).
« Une
stratégie classique de l’extrême droite » dit Katharine Nocur, coauteure
avec Pia Lamberty d’un ouvrage sur les complotistes intitulé : « Fake
facts : How Conspiracy Theories Influence our Minds ».
Ces foules
rassemblent des personnes influencées par les théories du complot : ceux
qui ne croient pas en la science, ceux persuadés que la 5G est utilisée pour
contrôler leur cerveau et qui intègrent désormais le coronavirus dans leurs
complots en disant soit que la covid-19 n’existe pas soit, à l’inverse, que c’est
une arme biologique ou que c’est une invention de Bill Gates ou de George Soros.
« Les
manifestants ne partagent pas une seule et même croyance. Ils ont en commun
leur volonté d’aller à rebours de la société. » Ils sont unis contre le
gouvernement et les mesures prises pour contrôler la pandémie. On a donc des
groupes qui vont de l’extrême droite à des tendances plus spiritualistes ou
ésotériques.
Le problème est
que certains des groupes qui appellent à ces manifestations n’excluent pas l’extrême
droite ; ils n’en sentent pas la nécessité. Ils disent : « Nous
ne sommes pas de droite, nous ne sommes pas de gauche, nous sommes juste
libres. »
Mais ça, c’est
bel et bien une stratégie classique de l’extrême droite qui, en fait, utilise
ces manifestations comme un cheval de Troie pour imposer son agenda à la
société tout entière. »
C’est une prise
en otage d’une colère qui peut être légitime. Les citoyens ont une légitimité à
manifester pour leurs droits, à protester contre la manière dont cette pandémie
est gérée ou pour promouvoir une meilleure façon de le faire.
« Cette
pandémie constitue en tout cas un terreau fertile pour les complotistes. Les études
de psychologie montrent bien que les gens sombrent plus facilement dans les
théories du complot lorsqu’ils sont anxieux, lorsqu’ils se sentent impuissants
ou quand ils ont le sentiment de ne pas avoir prise sur leur vie ou sur leur
situation.
Or la pandémie
questionne tout le monde, même les scientifiques avouent leur ignorance. Il est
difficile d’avoir des certitudes. Nous ne pouvons pas nous projeter de façon
certaine dans l’avenir. C’est ainsi que peuvent se propager plus facilement ces
théories du complot qui fournissent une réponse, une grille de lecture
structurée, là où il n’y a que désordre et confusion. »
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