Le billet politique par Frédéric Says sur France
Culture
« Face à
une crise aussi singulière, inédite, exceptionnelle, jamais connue de mémoire d’humain,
les responsables politiques se contentent trop souvent de recycler leurs idées
traditionnelles.
Est-ce l’effet
de la sidération ? Pour l’instant, on distingue peu d’innovations au
firmament des idées. Il y a comme une impression de faille spatio-temporelle. Les
réponses politiques sont d’un conformisme absolu, sans surprise. Sans suspense.
Des rengaines classiques, comme si rien de spécial n’était en train de se
passer.
Pour certains,
cette crise sanitaire ratifie la critique du « productivisme néo-libéral »,
pour d’autres, au contraire, elle donne raison à la politique de baisse des
déficits, une rigueur qui permet d’atténuer le choc et de financer la relance
de l’économie.
La pandémie,
nous dit Daniel Cohn-Bendit, rend plus urgente l’intégration européenne. Et pour
d’autres, elle valide à l’inverse l’idée d’une fermeture des frontières.
Bref, si l’on
tend l’oreille, tous entonnent une mélodie assez peu novatrice. Celle du : « J’avais
raison et les événements le confirment. »
Une situation
résumée par Raphaël Glucksman, du mouvement Place Publique, dans le Figaro.
« La
plupart [des politiques]voient dans la crise la confirmation de ce qu’ils
ont toujours cru. Leur monde d’après, c’est leur programme d’avant. »
Ce phénomène,
c’est ce qu’on appelle le « biais de confirmation » : cette faculté
à utiliser ce qui arrive pour renforcer sa propre vision du monde.
De sorte
que ce choc mondial, inédit semble être traité comme une péripétie de l’actualité,
qui permet de faire du commentaire et de recycler des idées anciennes.
« Le
jour où un astéroïde frappera la terre, il est fort à parier que l’on entendra
encore parler des 35 heures, de l’Ultra-libéralisme et de l’intégration européenne.
Cela dit, il faut se montrer indulgent. Nous ne sommes en réalité qu’au début
de cette crise. Et l’on peut comprendre la sidération, l’hébétude qui pousse à
ressasser, plutôt qu’à innover. C’est davantage un réflexe qu’une réflexion.
Du point
de vue de l’émulation intellectuelle, c’est ce qui peut arriver de pire. Une sorte
de résignation devant des discussions déjà entendues, alors que les logiciels
de pensée ne peuvent qu’être remis en cause. »
Des tribunes
d’intellectuels et d’artistes ont candidement lancé des pétitions pour imaginer
le « monde d’après » et se sont fait collectivement descendre et
moquer car ce sont des nantis, de la classe des privilégiés et on leur en veut
beaucoup en ce temps de déchéance économique et financière pour une grande partie
de la population.
J’ai à ce
propos lu quelque part que cette crise montre bien le fossé existant entre les
classes moyennes et les riches et les pauvres. Les premiers souffrent de l’ennui,
les seconds de la faim !
Le président
Macron avait suggéré aux français de profiter du temps de confinement pour se
retrouver et pour lire. Cela non plus, n’a pas été possible pour tous. Il y a
ceux qui peuvent se permettre d’attendre en relisant leurs classiques au fond
de leurs bibliothèques, en attendant que ça se passe. Pour les autres, rien ne
se passe.
Vision élitiste
et coupée du monde ?
La fracture
est notoire.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire