Dès le départ,
les restrictions formulées, en vertu du confinement décrété, un peu partout dans
le monde, ont suscité de nombreux débats, notamment chez les juristes : « Ne
touchons pas aux libertés fondamentales » est leur motto.
L’historienne
allemande Ute Frevert va même jusqu’à affirmer : « Ici, en Allemagne,
on parle beaucoup de confiance mutuelle. Les citoyens font confiance au
gouvernement. Le gouvernement fait confiance aux citoyens. Si on compare avec
la France, le Portugal, l’Espagne, l’Italie où les mesures ont été très fortes
et restrictives, en Allemagne, on n’a pas blessé autant les gens et amoindri
autant leurs libertés. »
Dans son
article, publié le 28 avril, dans le quotidien Frankfurter Allgemeine, elle
considère que « cette épidémie permet de mesurer la maturité d’une
société. »
En plus de
mettre en pratique ce concept de confiance mutuelle, les Allemands ont, d’après
elle, aussi fait preuve d’assistance mutuelle, d’entraide. « Une société
qui combat l’égoïsme est une des preuves d’une société mature ».
Lors de son allocution
télévisée, Angela Merkel a très vite blâmé les Allemands qui vidaient les
rayons des supermarchés en papier toilette ou en pâtes. « C’est inutile
et, en fin de compte, ça manque totalement de solidarité » leur a-t ’elle
dit.
Pour l’historienne,
« les Allemands ont aussi voulu profiter de cette crise pour corriger
cette image de peuple égoïste qui leur colle à la peau », notamment depuis
la crise de la zone Euro en 2011 et leur attitude face à la Grèce.
« Les mentalités
ne changent pas en une nuit » nuance-t ’elle. « Je ne parlerais pas
de ce moment comme d’un tournement décisif, il faudra juger dans la durée. Mais
cette crise a montré que nous avions un potentiel. Nous pouvons être des
rossignols plutôt que des corbeaux. »
Elle s’inquiète
aussi d’une atmosphère de délation et d’un contrôle social excessif, phénomène
que l’on a pu constater dans d’autres pays aussi, comme au Japon, par exemple. Elle
en appelle à la décence (Anstand, en allemand) qui doit aller de pair avec la distanciation
sociale (Abstand) pour éviter que la
société ne se délite.
« Les citoyens
font preuve d’une discipline impressionnante, mais il y a toujours des moutons
noirs. Alors certains qui disent obéir aux règles se sentent obligés de les dénoncer,
ce sont les corbeaux et cette pratique est insupportable » explique-t
’elle.
Dans un pays qui
a connu deux régimes sous lesquels informer sur les autres était pratiquement
une politique nationale, a commencé à apparaitre sur les réseaux sociaux le mot
« Denunziant » (mouchard ou dénonciateur).
« Tout cela
semble confirmer un préjugé profond que les allemands ont contre eux-mêmes :
qu’en cas de doute, une partie de la population est prête à devenir une extension
du pouvoir de l’Etat », déclare le professeur de Psychologie Christian
Stoecker à l’hebdomadaire Der Spiegel.
La police
allemande reçoit quotidiennement plusieurs centaines de signalements par
téléphone, mails ou réseaux sociaux « qui n’impliquent pas tous une
intervention. A Munich, environ 100 à 200 citoyens appellent chaque jour. A Berlin,
la police elle-même, agacée par des appels de délation, a demandé, sur Twitter,
aux habitants d’arrêter de saturer le numéro d’urgence 110 pas destiné à
signaler des violations au confinement. »
Et de l’autre côté
de l’Atlantique, le secrétaire d’Etat américain a, dimanche dernier, affirmé
détenir une « preuve énorme » confirmant que la Chine a sciemment
produit et diffusé le coronavirus.
Les relations
entre les EUA et la Chine sont ainsi entrées dans une nouvelle phase de fortes turbulences.
La Chine a été accusée par le président Trump, sur la chaîne Fox News, d’avoir
couvert l’apparition de l’épidémie à ses débuts, d’en avoir masqué l’ampleur au
monde et de l’avoir ensuite sciemment exportée à l’étranger.
« Ils ont
fait une erreur terrible au départ et ils ont tout fait pour la cacher »
résume Trump qui affirme aussi que « les chinois sont prêts à tout pour me
faire perdre l’action présidentielle de novembre. »
Une preuve qu’il
n’est bien évidemment « pas autorisé à révéler » et que les services
de renseignement américains se gardent bien de corroborer pour l’instant.
Mark Pompeo
affirme encore : « Ce n’est pas la première fois que la Chine
contamine le monde depuis ses laboratoires qui ne respectent pas les standards
internationaux. »
Et ce discours
semble marcher, à lire Politico : la haine de la Chine gagne du
terrain partout aux EUA, en tous cas dans les médias et les réseaux
conservateurs. La Chine est don condamnée sans procès.
Mais attention,
prédit à son tour l’éditorialiste Max Boot dans le Washington Post : « s’il
n’est pas factuellement faux de dire que la Chine a volontairement tardé à
lancer l’alerte internationale sur le nouveau coronavirus fin 2019, cela ne
mène à rien, pour l’Amérique, de vouloir lui faire tout payer, y compris les
manquements de sa propre administration. »
Si l’Amérique
décidait de mettre la Chine à genoux financièrement, les effets sur l’économie mondiale
seraient « bien pire encore ».
Et Max Boot
conclut qu’après tout, si on suivait cette logique simpliste du bouc-émissaire,
alors le monde serait en droit de demander des comptes aux EUA, car après tout,
la grippe soi-disant espagnole qui a fait entre 50 et 100 millions de morts à
travers la planète en 1918 et 1919 est partie d’une base militaire du Kansas et
a voyagé aux frais de l’armée américaine.
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